Pierre Victor Thuillier
1765 - 1794

Ami d'enfance et soutien fidèle de Saint-Just, Victor Thuillier a quitté la vie peu après lui, témoin gênant des vertus de son ami éliminé par les thermidoriens.

Il était né en 1765 à Blérancourt où il avait demeuré jusqu'en 1793. Son père y tenait une auberge «La croix blanche». Depuis l'adolescence, Victor s'était lié d'amitié avec Louis Antoine, de deux ans son cadet. Nous ne disposons pas de son portrait; juste une description dans son passeport: «cheveux châtains, front bas, nez long, yeux bleus, bouche moyenne, menton rond, visage plein».

Dès le début de la Révolution, Thuillier épaule sans faille Saint-Just dans ses luttes politiques à Blérancourt contre Gellé, Thorin et leurs alliés, lui apportant constamment et sans réserve son soutien moral. Le 7 février 1790, Victor est nommé greffier à la nouvelle municipalité, et il n'hésitera pas à mettre la plume de sa fonction au service de son ardent ami.

Saint-Just parti en 1792 siéger à la Convention, Thuillier reste à Blérancourt face au clan Gellé qui devient de plus en plus hostile à la Révolution. Dès lors, il ne cesse d'implorer Louis Antoine de lui trouver une place auprès de lui, afin qu'il puisse quitter ce «pays ingrat». Ce n'est qu'en août 1793 que Saint-Just peut satisfaire à sa demande, et Victor est nommé administrateur des subsistances militaires. En cette qualité, il va accompagner Saint-Just dans ses missions, le secondant efficacement dans la tâche difficile d'approvisionnement et de surveillance des fournisseurs; il ne fait pas de doute que l'efficacité de la politique de Saint-Just auprès des armées reposait pour beaucoup sur l'oeuvre de Thuillier et
Gateau.

En juin 1794, du retour de la mission à l'armée du Nord, Thuillier est nommé à la Commission de l'agriculture; en attendant qu'il trouve à Paris un logement pour lui, sa femme et son fils restés à Blérancourt, il est hébergé chez son ami, lui servant souvent de secrétaire comme jadis. On les imagine volontiers conversant sur les
Institutions républicaines, ce projet d'une cité nouvelle des amis et des frères, libre et proche de la nature, dont Saint-Just se préoccupait tant. Mais le 10 thermidor au soir, le rêve d'une république fraternelle s'est brisé. Arrêté le lendemain, Thuillier ne cessait d'acclamer son malheureux ami et d'accabler ses assassins d'accusations et de lourdes révélations. Son désespoir n'allait pas durer: quelques semaines plus tard, il était mort dans sa prison, probablement empoisonné.