La Bataille de Péronne dans le mémorial du Vermandois
Alors qu' en 1486 , Louis le Connétable de Ham fut étêtée pour avoir tenté de donner une milice au
Vermandois. En 1523, un de ses successeurs, Connétable également et parent
éloigné du mari chéri de Marie du Luxembourg passera simplement à l'ennemi et
viendra servir Charles Quint. Ce Charles III de Bourbon Monpensier combattit
ainsi les Français sans état d'âme, n'était-il pas comme le gros des troupes un
cadre polyvalent, apatride et à grosse valeur ajoutée ?
A cette partie de bras de
fer avec les mains fermées sur de grosses pièces d'or, les vaillants rois français avaient le bras un peu court.
Louis XII avait compris qu'il fallait assurer ses arrières et était venu à
Cambrai, terre d'empire pour y signer en 1508, un pacte avec l'empereur
d'Allemagne Maximilien et obtenir un peu de tranquillité. François Ier n'eut
plus droit à ce parrainage, aussi, la victoire de Marignan, dont il est inutile
de préciser la date, n' empêcha pas en 1525 la défaite de Pavie. Marignan avait
permis un séjour de quelques années dans les belles villes italiennes. Pavie
remettait tout en question puisque François Ier tomba aux mains du connétable
félon Bourbon . Fait prisonnier, sa libération fut payée, comme c'était l'usage
au prix fort. Les Flandres et l'Artois ainsi que la Bourgogne passaient à
Charles Quint. C'était le traité de Madrid qui donnait en prime le Milanais au
vaillant Bourbon et obligeait les deux fils de François Ier à séjourner en
otage à la cour d'Espagne.
L'humiliation de François
fut telle que Calvin lui dédia son ouvrage principal dans l'espoir de le
convertir : l'appui militaire inconditionnel des réformés était tout à fait
susceptible de faire basculer le fléau de la balance et la proposition dut fortement
embarrassée. Aussi pour démêler l'inextricable écheveau, il fut fait appel aux
spécialistes des chaussettes à repriser. Marguerite de Bourgogne, grand mère de
Charles Quint était encore vivante et
Louise de Savoie, mère de François Ier, aussi. Pour rapatrier les deux petits
otages, les reines-mères se retrouvèrent à Cambrai où les bonbons sont bons,
les laines superbes et les pays proches pleins de souvenirs divers.
Le second traité de Cambrai,
appelé aussi " la paix des dames " reprisa le traité de Madrid et la
France récupéra la Bourgogne, Boulogne-sur-Mer et les villes de la Somme,
perdue depuis Pecquigny: Ham et Péronne redevenaient françaises.
Charles Quint qui portait un
peu de sang de la famille du Luxembourg dans les veines faisaient un cadeau à
son royal cousin en lui restituant le Vermandois mais il fallait bien obéir à
grand mère !
Ce monarque si puissant
était un fils de la Bourgogne où depuis toujours la mère possédait l'autorité
suprême et présentait les caractéristiques de l'Européen idéal : né à Gand, il
parlait aux hommes en Français, aux chevaux en Allemand et à Dieu en Espagnol. Sa polyglotie reflétait
naturellement l'esprit et la spécificité des peuples et sa cours ne trouvait
pas motif d'orgueil et de fierté d'être nécessairement trilingue. N'était-ce
pas l'article de base de la construction européenne ? Ni l' Esperanto, ni
l'Anglais qu'il pratiquait aussi, ne figuraient aux rang des idiomes de premier
rang .
Depuis 1525, notre roi
mangeait des couleuvres et de la soupe à la grimace dans un pays coincé entre
l'Angleterre d'Henri VIII qui osera claquer la porte au nez du Pape pour des
histoires de femmes et Charles Quint qui contrôlait le soleil vingt quatre heures sur vingt quatre, ayant
des domaines dans chaque fuseau horaire. Comment sortir la tête de
l'eau ?
Faute des moyens qui
permettent d'acheter des armées, François Ier va entamer une politique
audacieuse : les rois de France avaient été les suzerains protecteurs des
croisades et lorsque le comté des chevaliers croisés s'effondrera, les amitiés
nouées avec les fils du prophète placeront les catholiques d'Orient sous la
protection des rois de France. Le pape Jean Paul II lors d'une homélie au
Bourget avait troublé les fidèles par sa question : France, qu'as-tu fait de ta
promesse ?
Il y avait, entre autre,
aussi le rappel de nos engagements envers le Liban, le peuple Arménien et les chrétiens des pays musulmans.
François Ier assumait,
malgré les difficultés, cette obligation qui lui vaudra l'amitié du grand Pacha Turc. Ce dernier revendiquait
aussi une place au jeu de marelle de l'Europe. Ses troupes s'étaient infiltrées
jusqu'en Hongrie et, partout en Méditerranée, sillonaient au gré des vents des
corsaires habiles improprement qualifiés de pirates barbaresques pour nos éditorialistes.
Puisque le Bourbon venait de
recevoir le Milanais qui s'étendait alors jusqu'en Provence, François Ier
recommanda aux pirates turques des débarquements sur notre côte d'Azur. Le stratagème
fut-il organisé par le monarque français ou résulta-t-il du vieux droit
d'aubaine sur tout ce qui traîne près des felouques?
L'annonce, en tout cas, de pillages par les Turcs, frères de
lait de chèvre des maures, se répandit dans toutes les chancelleries et la
rumeur incrimina le roi de France. Comme il n'est prêté qu'aux riches, les
troupes de mercenaires qui attendaient la couleuvrine au pieds et l'épée au
fourreau, jugèrent l'insinuation suffisante pour aller ferrailler. Les plus scandalisés et ,
qui sait, peut être même les fomenteurs de toute la cabale furent les premiers calvinistes qui savaient
déjà qu'il fallait se battre pour la vraie foi. Cet arrière plan de rumeurs
et d' insinuations, ainsi que de nombreux motifs inavouables offrir l'opportunité
aux troupes du Comte de Nassau ( ascendant direct de Guillaume d'Orange qui
fondera les Pays Bas comme puissance autonome) de fondre sur la belle ville de
Péronne. C'était le 10 Août 1536. Les douceurs de la saison et la proximité de
l'objectif donnaient à la campagne qui regroupait des Flamands, Allemands et
des troupes du Hainaut, un air de promenade de santé.
Mais Péronne n'avait pas
été choisie comme l'une des places
fortes principales de notre pays sans bonne raison. Non seulement, les bras de
la Somme l'isolait au milieu de l'eau, mais la ville venait juste de recevoir
de nouveaux remparts avec des échauguettes, des tours et des fortins. La
bataille se commua en siège ponctué de nombreux tirs d'artillerie : un feu
d'artifice somptueux avec quelques assauts en super cinémascope.
Les bourgeois et les paysans
réfugiés à l'intérieur des fortifications prirent résolument le parti de se
défendre contre des allégations invérifiables et partant suspects et , femmes
et enfants, tous résistèrent .
Malgré un tir approximatif mais soutenu d'artillerie, qui
endommagea la Grosse Tour construite par Philippe Auguste, la ville résista 32
jours. Le 12 Septembre, les assaillants scrutèrent le ciel et jugèrent bon de
rentrer.L'acte patriotique des Péronnais
stopa net les vélléités des "
ferrailleurs " du Nord.
François Ier remercia la
ville et ses habitants en accordant une charte de libertés et autorisa l'ajout
au blason de la cité d'une couronne fleurdelisée.
La ville prit également à
cette date sa devise:
" Urbs Nescia Vinci"
Ville jamais vaincue.
L'Hôtel de ville s'orna
d'une salamandre, qui était l'emblème de François Ier.Toutes ces illustrations
montraient la couleur à tous ceux qui seraient tentés de récidiver
.
Cette défaite fera réfléchir
les chefs malheureux. Le comte de Nassau se retirera sur ses terres où une
histoire particulière était
en germe.
Charles Quint, lui aussi, trouva la potion amère et décida de quitter le monde.
Pourquoi donc continuer à se préoccuper de toutes ces provinces nordiques où la
foi se désagrège et où des petites villes résistent au plus puissant des
monarques de la terre ?
Charles Quint confia le
Saint Empire à son frère et l'Espagne, l'Amérique et toutes ses provinces bourguignonnes et flamandes à son fils
Philippe II et se retira , au fond d'un monastère, pour entamer,en espagnol, un dialogue muet avec l'Eternel.
Le jeune hidalgo Philippe partait dans la vie avec un bel
héritage, la bénédiction papale, un parrain empereur d'Allemagne et une femme
rousse : Marie Tudor, la soeur du roi d'Angleterre. Sur la carte d' Europe, le
domaine de François Ier faisait désordre au milieu des domaines de la famille,
sans compter que ce pays vaniteux entretenait en son sein un mouvement
hérétique qui fragilisait le pouvoir du tonton Ferdinand, Kaiser du Reich. Une belle opération devait absolument
effacer l' affront de Péronne et sanctionner
l'alliance de François avec Soleiman. Les Français, ressentant toute la
pression du monde coalisé contre eux, retirèrent les troupes en campagne dans
le Piémont avec l'aide de nos amis suisses pour renforcer la ligne de front de
la Basse Champagne. Craignant pour Paris, François Ier signa un traité à Crépy
en Laonnois par lequel il abandonnait
ses prétentions sur l'Italie en obtenant toutefois que le Milanais soit confié
à Charles d'Orléans, fiancé à une infante d'Espagne.