L'ESTOCART, Paschal de (ca 1539-ap.
1584)
Paschal de l'Estocart fait partie de ces figures extraordinaires qui ont marqué leur temps et que nous redécouvrons aujourd'hui.
Ce que l'on sait de Paschal de l'Estocart se résume
essentiellement aux renseignements fournis par les préfaces de ses divers
recueils (dont celle des
Cent cinquante pseaumes). Un portrait,
gravé d'abord dans les
Octonaires de la Vanité du Monde (1582) puis
dans les
Cent cinquante pseaumes l'année suivante, le présente de
trois quarts, la tête entourée de la mention "PASCHAL DE L'ESTOCART AAGE
DE XLII ANS."
Paschal de l'Estocart
selon biographie de M Henri Expert qui le premier réédita les deux livres de l'Octonaires
Si nous en croyons ce portait qui figure aux Octonaires, qui le dit agé de 42 ans, Paschal de l'Estocart serait né vers 1540 à Noyon .
Après un séjour en Italie où, durant plusieurs années, il s'était adonné à d'autres affaires qu'à la musique, Paschal de L'Estocart
est immatriculé comme étudiant à l'Université de Bâle du 22 juin 1581 au
30 avril 1582. Les Octonaires de la Vanité du Monde sont composés à cette époque et , en novembre 1581, il en dédie le premier livre à Guillaume-Robert de la Mark, duc de Bouillon, aux fermes convictions huguenottes, qui devait mourir très jeune. Un second livre d'Octonaires, paru la même année que le premier , est dédié au frère du duc de Bouillon, le comte Jean.
Les termes des dédicaces de ces ouvrages, les pièces liminaires qui les accompagnent, tout annonce les convictions religieuses du musicien . Rentré en France il se reprit à composer.En 1582, le 4 avril, il reçoit 60 écus du Duc
Charles III de Lorraine en remerciement de sa dédicace des Quatrains du
sieur de Pibrac. D'ailleurs en 1583, il va donner à son éditeur lyonnais les Cent-cinquente Psaumes de Marot et de Théodore de Bèze : à n'en pas douter, nous sommes devant un calviniste fervent, dont l'art traduira l'ardente foi.
Cependant les archives du Puy de musique d'Evreux nous le montrent , en 1584, faisant partie de la chapelle de Nicolas de Braban ( ou de Bréhan), abbée de Vallermont. Il obtient alors au concours de ce Puy, pour la composition d'un motet à 5 voix, sur le texte du psaume Ecce quam bonum et quam jucundum, le prix de la Harpe d'argent .
Faut-il penser qu'en ce milieu ultra-catholique, Paschal de L'Estocart, un huguenot, répondait à la pacifiante modération de l'ancien gouverneur de Normandie, Henri-Robert de la Mark ? Mais, du reste, ce n'est point là un exemple unique, en ce temps d'affreuses luttes civiles, que de voir les arts imposer l'union sacrée d'esprits et de coeurs.
Après 1584, nous ne savons plus rien de Paschal de l'Estocart : il doit être cependant dans la pleine puissance de l'age du génie.
Nous aimons croire que les archives lyonnaises, celle de Normandie et de Picardie nous mettront sur les traces de cet artiste, l'un des plus curieux, des plus personnels de son temps, et assurément, l'un des plus admirables, encore que de nos jours il soit complètement inconnu.
L'extrait du Privilège de 1581 mentionne comme des oeuvres de l'Estocart déjà composées : les Quatrains de Pibrac, les Octonaires de la vanité du monde, les Psaumes en vers latins et français distingez en plusieurs livres en formes de motes, les Meslanges de chansons latines et françaises, les Cent-cinquante Psaumes de David, mis en rime par Clément Marot et Théodore de Bèze.