La
disparition de Robespierre, le 10 thermidor an II, mit fin à
la Grande Terreur. Les nouveaux maîtres, jacobins rigides
comme Billaud-Varenne et Carnot, athées comme Vadier que le
culte de l’Etre Suprême exaspérait, politiciens
pourris comme Barras et Fouché, ou amoureux pressé
d’agir pour sauver sa belle comme Tallien, ne songeait ni à
changer de régime, ni à modifier son orientation,
encore moins à en revenir à une politique de détente.
Mais
ils furent emportés par le torrent d’allégresse
qui suivit la chute du « tyran ». Robespierre, ayant
mécontenté beaucoup de monde en épurant les
factions (Girondins, Hébertistes, Dantonistes…),
devint naturellement le bouc émissaire, et donc seul
responsable des multiples exactions commises. « Le même
coup qui l’avait frappé, tua la peur. La France entière
avait la nausée de l’échafaud. Bon gré
mal gré, le régime dut suivre l’opinion »
(Daniel Rops)
Et
en effet, si la Convention continua de gouverner, une nouvelle
période s’ouvrit : le climat général
changea du tout au tout. Les nouveaux dirigeants, s’alliant
aux modérés, prirent en main les destinées du
pays. Ils fermèrent le Tribunal révolutionnaire et le
Club des Jacobins, bâillonnèrent les Comités de
salut public, et tentèrent de revenir à une sorte de
normalité, allant même jusqu’à autoriser
le retour du culte catholique (à leur corps défendant).
L’euphorie gagna le pays tout entier : «
on rapporte qu’un jeune député de Lyon, Camille
Jordan, déployait un tel talent pour réclamer la
restitution des sonneries de cloches qu’il y acquit le surnom
de « Jordan-Carillon » (Daniel Rops).
Mais
les difficultés se multipliaient : le gouvernement faible et
devisé ne parvenait pas à imposer les réformes
souhaitables. La chute des assignats plongeait le peuple dans une
sombre misère aggravée par un hiver particulièrement
rigoureux. Des émeutes éclatèrent un peu
partout. Par bonheur, les victoires de Pichegru et de Jourdan contre
les ennemis extérieurs permirent d’entamer des
pourparlers de paix et de sauver un gouvernement aux abois.
C’est
alors que la Convention décida de se saborder, de confier
l’élaboration d’une nouvelle Constitution à
la « commission des onze » et de faire évoluer le
régime de la République: ce sera le Directoire.
D’entrée, celui-ci hésita entre droite et
gauche, entre tolérance et fermeté : en fait, sans
ligne conductrice, sa politique ballottait au gré des
évènements.
Plusieurs
conspirations, montagnardes, royalistes et babouviste, plus une
élection qui éliminait à 95% les anciens
conventionnels de la chambre des députés, força
le gouvernement à adopter une attitude radicale. Se souvenant
que les anciennes lois de terreur n’étaient pas
abrogées, ils décidèrent de les appliquer à
la lettre.
S’ouvrit
alors une nouvelle ère de persécution contre tout ce
qui « troublait l’ordre public » : en premier, les
royalistes et le clergé catholique, prêtres jureurs et
non jureurs étant finalement mis dans le même sac.
Cependant,
il n’était pas question d’un retour à la
guillotine, le peuple écœuré par tant de sang
versé, ne l’aurait plus supporté.
Elle
fut remplacée par la déportation en Guyane, dont le
but était de faire mourir à petit feu les condamnés.
C’est
ce qu’on a appelé le régime de la «
guillotine sèche ». Ce furent surtout des prêtres,
des royalistes, des opposants républicains et des «
inciviques » de toutes sortes… qui «
bénéficiaires » de ce mode d’exécution
particulièrement indigne. Ils furent embarqués sur ces
fameux pontons de Rochefort qui, entre 1792 et 1795, virent périr
un grand nombre de prêtres réfractaires.
De
Gracchus Babeuf, condamné pour avoir participé à
la « conjuration des Egaux» soi-disant destinée
à renverser le Directoire
(2)
C’était en fait la mort de la République qui fut
sauvée par l’intervention « musclée »
du jeune général Bonaparte.