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FIG.1. - LES RUINES DE COUCY par Viollet-le-Duc
FIG. 2. - PLAN
GÉNÉRAL DU CHATEAU ET DE LA CITÉ DE COUCY
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A, baille ou basse-cour séparant la ville du château.
B, le château.
C, la ville.
D, fossé propre au château.
E, porte et première défense du château
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FIG. 4. - CARREAUX INCRUSTÉS ET ÉMAILLÉS provenant du
château de Coucy.
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DESCRIPTION DU CHATEAU DE COUCY
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Dès le
commencement du xe siècle, il existait déjà sur l'emplacement actuel du
château de Coucy une forteresse bâtie par un archevêque de Reims. Ce
territoire appartenait au siège de Reims depuis saint Remi, à qui il aurait
été donné par Clovis. En 928, le comte de Vermandois: Herbert, s'en empara et
y renferma Charles le Simple. Thibaut, comte de Troyes, surnommé le
Tricheur, le gagna et le perdit plusieurs fois. L'archevêque de Reims
finit par le donner en fief au fils du comte, pour un cens annuel de soixante
sous. De ce premier domaine il ne reste aucun
vestige; peut-être la chapelle qui autrefois existait dans la basse-cour du
château (voy. fig. 5, en A) était-elle un débris de ces constructions
antérieures au XIIIe siècl e; la forme de son plan et les débris
retrouvés pourraient ]e faire supposer. Ce qu'on ne saurait
contester, c'est que les parties les plus anciennes du château ne remontent
pas au delà du commencement du XIIIe siècle.Ce fut Enguerrand III,
le vassal le plus puissant de la couronne
de France, qui non seulement éleva le vaste château,.de Coucy dont nous
voyons encore les restes, mais qui fit bâtir toute l'enceinte de la ville.
Enguerrand III eut des démêlés avec l'archevêque de Reims; il ravagea
le territoire de cette église, qui ne rentra en possession de ses terres que
par l'intervention de Philippe-Auguste. Enguerrand fit partie de l'expédition
contre les A]bigeois, avec le célèbre comte Simon de Montfort, et fut un des
héros de la bataille de Bouvines. Peu après, il eut de nouveaux démêlés avec
le chapitre de Laon; il s'empara de la cathédrale, enleva le doyen, ]e fit
enfermer à Coucy et ravagea les terres de l'église. La querelle dura deux
années, pendant lesquelles, malgré les protestations des évêques voisins et l'intervention du
pape, le doyen resta en prison. Enguerrand contracta des alliances qui augmentèrent
encore sa puissance et ses richesses; il se maria trois fois, et sa dernière
femme, Marie de Montmirail, lui apporta en dot la terre de Condé en Brie.
Enguerrand, par voie de succession, devint seigneur de Montmirail,
d'Oisy, de Crèvecœur et de la Ferté-Ancout, de laFerté-Gaucher,
vicomte de Meaux et châtelain de Cambrai; il était déjà seigneur de
Saint-Gobain, d'Assis, de Marle, de la Fère et de Folembray. Ses richesses,
et surtout la trempe de son caractère, engagèrent le sire de Coucy dans les
entreprises tentées contre le pouvoir royal pendant la minorité de saint
Louis. Un instant le vassal pensa pouvoir mettre la main sur la couronne de France ; mais ses sourdes menées et ses projets
ambitieux furent déjoués par la politique de la reine Blanche, qui sut enlever
à la coalition féodale un de ses plus puissants appuis, le comte de Champagne.
Le sire de Coucy fut bientôt obligé de prêter serment de fidélité entre les
mains du roi, qui ne voulut pas se souvenir des projets de son trop puissant
vassal. C'est à l'époque des rêves ambitieux d'Enguerrand III qu'il faut faire remonter la
construction du château magnifique dont nous voyons encore les ruines gigantesques.
Le château de Coucy dut être élevé très rapidement, ainsi que l'enceinte de la
ville qui l'avoisine, de 1225 à 1230. Le caractère de la sculpture, les
profils, ainsi que la construction, ne permettent pas de lui assigner une date
plus ancienne ni plus récente.
Le château de Coucy n'est plus une enceinte flanquée, enveloppant des bâtiments disposés au
.hasard, ainsi que les châteaux des XIe et XIIe siècles; c'est un édifice
vaste, conçu d'ensemble et élevé d'un seul jet, sous une volonté puissante et
au moyen de ressources immenses. Son assiette est admirablement choisie et ses
défenses sont disposées avec un art dont la description ne donne qu'une faible
idée. Bâti à l'extrémité d'un plateau de forme très irrégulière, le
château de Coucy domine des escarpements assez rapides, qui s'élèvent de cinquante mètres
environ au-dessus d'une riche vallée, terminée au nord-ouest par la ville de Noyon et au nord-nord-est par celle de
Chauny; il couvre une surface de dix mille mètres environ (fig. 2). Entre la
ville et le château est une vaste basse-cour fortifiée A, dont la surface est
triple au moins de celle occupée par le château. Cette basse-cour, ou baille,
renfermait des salles assez étendues, dont il reste des amorces visibles encore
aujourd'hui, enrichies de colonnes et
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DESCRIPTION DU
CHATEAU DE COUCY.
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chaussée (fig. 5). C'est la chapelle romane
dont nous venons de parler1. On ne communiquait de la ville dans la baille
que par une porte donnant sur la ville et défendue contre elle par deux tours
en partie conservées2.La baille était protégée par le donjon B,
qui domine tout son périmètre, et les remparts flanqués par les deux tours
extrêmes du château, C, D. Un fossé de vingt mètres de largeur sépare le
château de la basse-cour. Un seul pont jeté en E sur ce fossé donnait entrée
dans le château et était composé de piles isolées, avec deux n tabliers à bascule de bois, défendus par deux postes
avancés E', E" ou châtelets, et deux corps de garde F, F' osés
sur des piles, de manière à laisser libre le fond du fossé. La porte enG est
munie de doubles herses et de vantaux. Cette porte s'ouvre sur un long
passage voûté qu'il était facile de défendre, et qui devait être muni de
mâchicoulis ouverts dans la voûte. Des deux côtés du
couloir sont disposées des salles de garde H voûtées et pouvant contenir des
postes nombreux. Au-dessus s'élevait un logis à plusieurs étages, dominant la
porte et se reliant à la courtine I. Du couloir d'entrée on débouchait dans
la cour K du château, entourée de bâtiments appuyés sur les courtines. En L,
se trouvaient des bâtiments de service voûtés à rez-de-chaussée et surmontés
de deux étages; en M, les appartements d'habitation à trois étages, du côté
oû le château est le moins accessible du dehors, et desservis par
Des fouilles ont mis à découvert les premières assises de cette chapelle, construite au
Xl" siècle et restaurée à la fin du XII., ainsi que le prouvent les
fragments retrouvés en place.! Fig. 2, E. - C'est
dans les bâtiments dépendant de cette porte que le seigneur de Coucy logeait le chapelain. On désignait
ce bâtiment sous le nom de porte Maître-Odon; voy. en E, sur le plan
général, fig. 2. (Voyez le Dictionnaire historique du département de
l'Aisne, par .M. Melleville, 1857.)
le grand escalier M'; en N, de vastes magasins voûtés
à rez-de-chaussée ( celliers), avec caves au-dessous étage, la grand' salle
éclairée sur les dehors. En 0, on voit les soubassements de la chapelle, qui,
au premier étage, se trouvait de plain-pied avec la grand' salle. Les cuisines
étaient très probablement placées en P, avec escalier particulier P’ communiquant
aux caves; elles possédaient une cour particulière en R, à laquelle on arrivait
sous la chapelle, dont le soubassement, formant rez-de-chaussée, reste à jour.
Les tours, C, D, S, T, possèdent deux étages de caves et trois étages de salles
au-dessus du sol, sans compter l'étage des combles. Elles sont, comme on le
remarquera, très saillantes sur les courtines, de manière à les bien flanquer.
Ces tours, qui n'ont pas moins de dix-huit mètres de diamètre hors d'œuvre, sur
trente-cinq mètres environ de hauteur au-dessus du sol extérieur, ne sont rien
auprès du donjon, qui porte trente et un mètres de diamètre hors d'œuvre sur
soixante-trois mètres depuis le fond du fossé dallé jusqu'au couronnement.
Outre son fossé, ce donjon possède une enceinte circulaire extérieure, ou chemise,
qui le protège contre les dehors du côté de la baille. On montait du sol de
la cour au chemin de ronde de la chemise par la rampe V, près de l'entrée du
donjon. On communiquait des salles P (cuisines) avec les dehors au moyen d'un
escalier descendant au fond du fossé de la chemise et par une poterne percée en
X, munie de vantaux, de mâchicoulis et de herses, correspondant à une seconde
poterne Y avec pontlevis donnant sur l'escarpement et masquée par la tour C.
Un chemin de ronde inférieur X', voûté en demi-berceau, perc é au niveau
du fond du fossé, suit la circonférence de la chemise, et était évidemment
destiné à arrêter les travaux des
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DESCRIPTION DU CHATEAU DE COUCY.
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mineurs, comme nos galeries de contre-mine permanentes, ménagées sous les revêtements des
courtines et bastions. Dans ce souterrain, en X", se trouve une source excellente à fleur de terre, à
l'usage de la cuisine. En W, sont des latrines, prises aux dépens de
l'épaisseur du mur de la chemise, pour les gardes de cette enceinte et les
gens de cuisine.
En Z était une cage avec escalier de bois!, pouvant être détruit facilement, qui mettait le souterrain
inférieur en communication avec le chemin de ronde supérieur. Le petit
escalier Q, donnant dans la salle P, desservait la herse et le mâchicoulis de
la poterne X. Le souterrain inférieur X' se trouvait encore en communication
avec l'escalier D, desservant les ouvrages supérieurs de la porte. Si
l'assiégeant s'était emparé de la poterne X (ce qui était difficile,
puisqu'il fallait franchir la .première porte Y et son pont-levis, traverser
le chemin YZ sous les projectiles lancés de la partie supérieure de la chemise
et du crénelage ouvert sur le mur J, forcer deux vantaux et affronter un
mâchicoulis), il se trouvait en face de la herse donnant sur le fond du fossé
de la chemise, ayant à sa gauche la porte ferrée qui fermait le bas de
l'escalier de la cuisine, et arrêté dans la galerie inférieure X' par la
source X", qui est un véritable puits dans un souterrain obscur. S'il
forçait la herse, il pénétrait dans le fond du fossé intérieur V', lequel est
dallé et sans communication avec le sol de la cour. Battu par les défenses
supérieures du donjon, qui lui envoyaient des projectiles d'une hauteur de
soixante mètres, et par le chemin de ronde de la courtine, il était perdu,
d'autant que les hommes occupant ce chemin de ronde pouvaient descendre par l'escalier
Z, passer dans la galerie de contre-mine X', traverser la
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i Voyez du Cerceau: Les plus excellens bastimens de
France.
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source sur une planche, et lui couper la retraite en renfermant la porte derrière lui. Si,
au fond du fossé extérieur, il parvenait à miner le pied de la chemise, il
trouvait le souterrain occupé. Ce travail de sape ne pouvait, en aucune façon,
affaiblir les murs de la chemise, car on remarquera que ce souterrain est pris
aux dépens du talus, d’un soubasseùent incliné, derrière lequel la maçonnerie
de la chemise est intacte.De toutes les défenses du château de Coucy, le donjon est de beaucoup la plus forte et la
mieux traitée. Cette belle construction se compose, à l'intérieur, de trois
étages voûtés, et d'un large chemin de ronde supérieur, avec comble plat au
centre, recouvert autrefois de plomb. Pour entrer dans la salle du
rez-de-chaussée, il fallait franchir un pont à bascule (pont-torneïs) qui,
roulant sur un axe, fermait la porte en se relevant. Les traces de cette
disposition primitive sont encore visibles (fig. '12). Le tablier du
pont à bascule tombait sur une pile isolée, dont on retrouve les premières
assises au milieu du fossé. Le pont abaissé au moyen d'un treuil G placé dans
un petit entresol au-dessus de la porte, on était arrêté par une herse glissant
dans deux rainures, derrière les tableaux de la porte, et par un mâchicoulis.
La herse et le mâchicoulis étaient servis de même par les gens postés dans la
pièce de l'entresol. A la suite de la herse se trouvait une porte à un
vantail, renforcée d'énormes barres rentrant dans l'épaisseur de la muraille.
Pour pénétrer dans la salle ou dans l'escalier, il fallait encore forcer des
portes munies de barres. Il existait même une grille à l'issue du couloir
d'entrée sur la salle, afin de permettre aux gens du dedans de couvrir de
projectiles ceux qui se seraient aventurés sous ce passage. La salle du
rez-de-chaussée est magnifique;elle se décompose de douze côtés, formant chacun une large niche
voûtée en berceau tiers -point. On observera que ces niches sont doubles en hauteur, formant ainsi
deux rangs de vastes armoires l'un au-dessus de l'autre, très propres à
conserver et rangeravec ordre les projectiles et armes dont on avait besoin
en temps de siège.
Un des renforcements contient un puits très profond et large ;
un autre sert de cheminée. A gauche du couloir d’entrée sont des
latrines ; à droite, l’escalier qui monte jusqu’au faîte du donjon.
Cette salle était voûtée au moyende douze demi-arcs en quart de cercle,
aboutissant à une clef énorme percée d’un œil(*) , afin de permettre aux hommes postés dans
l’étage supérieur de donner ou de recevoir des ordres. Ces arcs sont portés
sur des chapiteaux en culs-de-lampe sculptés, avec figures. Deux fenêtres
percées à une grande hauteur éclairaient ce rez-de-chaussée, et quoique la
salle dût être assez sombre, elle était intérieurement décorée de peintures.
Le premier étage présentait la même disposition en plan, et était
voûté de la même manière. La salle contenait, outre la cheminée, un four à
cuire le pain; elle était éclairée par trois fenêtres, et était mise en
communication avec la chemise au moyen d'une petite porte et d'un pont volant
de bois, dont on voit encore les scellements. A l'époque des reconstructions
partielles du château, c'est-à-dire au commencement du xv" siècle, on pratiqua un petit réduit sous une des fenêtres, ayant une' entrée
détournée dans la salle, et une ouverture au dehors. Des latrines sont disposées
à cet étage au-dessus de celles du rez-de-chaussée.Le second étage, couvert en partie par des voûtes en berceau, en partie par une vote en arcs ogives à douze
pans, présente une disposition fort belle et bien conçue: c'est une grande
salle entourée d'un portique, dont le sol est élevé de trois mètres au-dessus
du pavé. Des balcons de bois, dont la trace est partout évidente, permettaient
de s'avancer jusqu'à la circonférence intérieure formée par les têtes des
piles. C'était là qu'on réunissait toute la garnison, lorsqu'il fallait donner
des ordres généraux. Douze ou quinze cents hommes armés pouvaient facilement,
grâce à ce portique et à ces balcons, se tenir dans cette immense rotonde et
entendre ce qui se disait au centre.
Il n'est guère de monuments, soit de l'époque romaine, soit. modernes, qui
présentent un aspect à la fois plus grandiose et plus puissant.Nous
essayons d' en donner une faible idée dans la figure 7.
Qu'on se représente par la pensée un millier d'hommes d'armes réunis dans cette rotonde et son portique disposé comme les loges d'une salle
de spectacle; des jours rares éclairant cette foule; au centre, le châtelain
donnant ses ordres, pendant qu'on s'empresse de monter, au moyen d'un treuil,
des armes et des projectiles à travers les œils des voûtes. Ou encore, la nuit,
quelques lampes accrochées aux parois du portique, la garnison sommeillant ou
causant dans ce vaste réservoir d'hommes; qu'on écoute les bruits du dehors qui
arrivent par l'œil central de la voûte, l'appel aux armes, les pas précipités
des défenseurs sur les hourds de bois, certes on se peindra une scène d'une
singulière grandeur. Si loin que puisse aller l'imagination des romanciers ou
des historiens chercheurs de la couleur locale, elle leur représentera
difficilement ce que la vue de ces monuments si grands et si simples dans leurs
dispositions rend intelligible au premier coup d' œil. Aussi conseillons-nous à
tous ceux qui aiment à vivre quelquefois
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DESCRIPTION DU CHATEAU DE COUCY.
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mieux la féodalité dans sa puissance, ses mœurs, sa vie toute guerrière, que cet admirable débris du château d'Enguerrand.
En montant toujours par l'escalier à vis, on arrive au dernier étage, qui est crénelé. Une couverture de plomb protégeait les
voûtes t formait une plate-forme en pavillon; à l'entour, un large
chemin de ronde permet de circuler librement et d'arriver aux créneaux. Les
écoulements d'eau, bien ménagés dans les reins de chacune des voûtes du
portique, ne peuvent laisser douter que cet étage n'ait toujours été laissé à
ciel ouvert, ainsi que l'indique la gravure de du Cerceau; cependant, en temps de guerre, de grands hourds à double étage
étaient posés sur les corbeaux de pierre qui existent en contre-bas du
crénelage. Les figures 3 et 9 présentent une portion de ces hourds posés, et la fig. 10
montre leur mode de construction. On voit apparaître au sommet du donjon de
Coucy la transition des hourds de bois aux mâchicoulis de pierre. En
effet, pour un ouvrage aussi puissamment conçu et exécuté,les
hourds portés sur des solives en bascule ne devaient pas paraître
une défense assez durable. Ce système de hourds portés sur des consoles de
pierre est appliqué non seulement dispositions défensives de Coucy n'attirent pas seules l'attention de l'archéologue; le donjon
présente des fragments de sculptures d'une grande beauté.Voici
par quel procédé le donjon de Coucy dut être élevé,La
construction fut conduite en spirale, de la base au sommet, au moyen d'un échafaudage dressé en même temps que les
maçonneries s'élevaient; cet échafaud formait ainsi en dehors
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A la porte de la ville de Coucy, dite porte de Laon, on voit encore des>fragments de ces hourds de bois posés sur des
corbeaux de pierre.
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DESCRIPTION
DU CHATEAU DE COUCY.
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du parement extérieur un chemin incliné qui permettait de rouler sans difficulté les plus
grosses pierres jusqu'au faîte. Les trous carrés des boulins de ces échafauds
et des liens qui empêchaient leur bascule sont visibles et régulièrement disposés
au pourtour de l'énorme cylindre. II est impossible d'employer un procédé à
la fois plus simple et plus ingénieux pour bâtir rapidement,
et sans frais inutiles, une aussi grosse tour. Aujourd'hui les voûtes des
trois étages sont crevées, et le glacis su périeur ainsi que les quatre
pinacles qui couronnaient la corniche n'existent plus. Ce couronnement nous
est indiqué par du Cerceau, dans son livre: Les plus excellens
bastimens de France. On a trouvé quelques morceaux de ce glacis et
des pinacles dans le fond du fossé. Toute la maçonnerie était chaînée au
moyen de longrines de bois de Om, 20 à Om, 30 d'équarrissage, noyées dans l'épaisseur des murs, suivant la méthode encore en usage au XIIe
siècle. Au-dessus des voûtes du premier et du second étage, ce chaînage se
reliait à des enrayures également de bois. Vers '1400, la grande salle et les bâtiments d'habitation >(voyez
la figure 5) furent reconstruits, ainsi que les étages supérieurs de la porte, par Louis d'Orléans, qui avait acquis ce domaine de la dernière
descendante des Coucy ; des jours plus larges furent
percés à l'extérieur, et les courtines reçurent des mâchicoulis avec parapets
de pierre, suivant la méthode du temps, au lieu de consoles avec hourds de
bois. Les autres parties du château restèrent telles qu'Enguerrand III les
avait laissées.Ce
ne fut que pendant les troubles de la Fronde que cette magnifique résidence
seigneuriale fut entièrement ravagée.
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l Voyez
la Notice sur le château de
Pierrefonds.
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DESCRIPTION DU
CHATEAU DE COUCY
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Son gouverneur, nommé Hébert, fut sommé par
le cardinal Mazarin de rendre la place entre les mains du maréchal d'Estrées,
gouverneur de Laon. Hébert ayant résisté à cette sommation en prétextant d'ordres contraires laissés par le
roi Louis XIII, le siège fut mis, le 10 mai 1652, devant la ville, qui fut
bientôt prise; puis, quelque temps après, la garnison du château capitula. Le cardinal Mazarin
fit immédiatement démanteler la place. Le sieur Metezeau, fils de l'ingénieur
qui construisit la digue de la Rochelle, fut celui que le cardinal envoya à
Coucy pour consommer cette œuvre de destruction. Au moyen de la
mine, il fit sauter la partie antérieure de la chemise, ainsi que les voûtes
du donjon et la plupart de celles des autres tours, il incendia les bâtiments
du château et le rendit inhabitable.Depuis lors les
gens de Concy, jusqu'à ces derniers temps, ne cessèrent de prendre dans
l'enceinte du château les pierres dont ils avaient besoin pour la
construction de leurs maisons, et cette destruction prolongée compléta
l'œuvre de Mazarin. Cependant, malgré ces causes de ruine, la masse du château de Coucy est encore debout et est
restée une des plus imposantes merveilles de l'époque féodale (fig. 1). Si l'on
eût laissé au temps seul la tâche de dégrader la résidence seigneuriale
des sires de Coucy, nous verrions encore aujourd'hui ces énormes
constructions dans toute leur splendeur primitive, car les matériaux, d'une
excellente qualité, n'ont subi aucune altération; les bâtisses étaient
conçues de manière à durer éternellement, et les peintures intérieures, dans
les endroits abrités, sont aussi fraîches que si elles venaient d'être
faites.Autant qu’on peut le reconnaître en examinant les constructions, le château de Coucy est
traversé dans ses fondations par
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DESCRIPTION DU
CHATEAU DE COUCY.
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cachées entre tous les points de la défense
intérieure et les dehors.La tradition va même jusqu'à prétendre qu'un de ces souterrains, dont l'entrée se voit dans
les grandes caves, sous les bâtiments d'habitation M, se dirigeait, à travers
les coteaux et les vallées, jusqu'à l'abbaye de Prémontré. Nous sommes loin
de garantir le fait, d'autant plus que des légendes semblables s'attachent
aux ruines de tous les châteaux du moyen âge en France; mais il est certain
que, de tous côtés, dans les caves,on aperçoit des bouches de galeries voûtées
qui sont aujourd'hui remplies de décombres. Nous donnons(fig. 8) le plan du
premier étage du château de Coucy. On voit: en A, les logis placés au-dessus
de la porte d'entrée; en B, le donjon avec sa chemise; en R, la chapelle
orientée, conçue et exécutée avec une grandeur sans pareille, si l'on en juge
par les fragments des meneaux des fenêtres qui jonchent le sol; en D, la
grand'salle du tribunal, dite des Preux, parce qu'on voyait dans des niches
les statues des neuf preux. Deux cheminées chauffaient cette salle,
largement éclairée à son extrémité méridionale par une grande verrière
ouverte dans le pignon.Une charpente de
bois avec berceau ogival lambrissé couvrait cette salle. En E, la salle des neuf
Preuses, dont les figures étaient sculptées en ronde bosse sur le manteau
de la cheminée(fig. 13). Du
Cerceau nous a conservé une gravure de cette cheminée, qui se divisait en
deux âtres séparés par un pilier, ainsi que l'indique le plan. Un boudoir F,
pris aux dépens de l'épaisseur de la courtine, accompagnait la salle des
Preuses. Cette pièce, éclairée par une grande et large fenêtre donnant sur la
campagne du côté de Noyon, était certainement le lieu le plus agréable du
château; une petite cheminée la chauffait, et elle était voûtée avec élégance
par des voûtes d'arête.
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Ces dernières bâtisses datent de la fin du XIV. siècle ou du commencement du XV'.
On voit parfaitement comment elles furent incrustées dans les anciennes
constructions; comment, pour les rendre plus habitables, on suréleva les
courtines d'un étage: car, dans la construction primitive, ces courtines n'atteignaient
certainement pas un niveau aussi élevé, laissaient aux cinq tours un commandement
plus considérable, et les bâtiments d'habitation avaient une beaucoup moins
grande importance. Du temps d'Enguerrand III, la véritable habitation
du seigneur était le donjon; mais quand les mœurs, féodales,
de rudes qu'elles étaient, devinrent au contraire, vers la fin du XIVe
siècle, élégantes et raffinées, ce donjon dut paraître fort triste, sombre et
incommode: le duc d'Orléans, devenu seigneur de Coucy, 'bâtit alors ces
élégantes constructions ouvertes sur la campagne, et les fortifia suivant la
méthode adoptée à cette époque.Le donjon et sa chemise, les quatre tours d'angle, la partie inférieure des
courtines, le rez-de-chaussée de la porte d'entrée
et la chapelle_ ainsi que toute l'enceinte de la baille; appartiennent à la
construction primitive du château de Coucysous Enguerrand III.Ces
quatre tours méritent que nous en disions quelques mots. Chaque chambre, à
partir du rez-de-chaussée, se compose à l'intérieur de six pans avec niches,
dont quelques-unes sont percées de meurtrières. Ces pièces sont voûtées, et
les niches se chevauchent à chaque étage, les pleins étant au
dessus des vides, et viceversa; ce qui était fait pourvoir tous les
points du dehors, et surtout pour éviter les lézardes verticales qui se
produisent dans ces sortes de constructions,lorsque les vides sont tous
au-dessus les uns des autres. Des cheminées sont pratiquées dans les salles,
qui sont en outre accompagnées
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DESCRIPTION DU
CHATEAU DE COUCY.
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de latrines.On
remarquera que les escaliers à vis ne montent pas de fond, mais
s'interrompent à partir du premier étage pour reprendre de l'autre côté de
l'entrée de la tour.C'est là une disposition sou vent adoptée dans les tours de cette époque, afin
d'éviter les trahisons et de forcer les personnes qui veulent monter sur les
parapets de passer par l'une dés salles. C'était un moyen de rendre la
surveillance facile, et de reconnaître les gens de la garnison qui montaient
aux chemins de ronde pour le service; car les parapets des courtines n'
étaient accessibles que par des tours, et tous les escaliers des tours
desservaient par conséquent toutes les défenses supérieures. Nous avons figuré en G (fig. 8) le pont
volant mettant en communication la grand' salle D avec le chemin de ronde de
la bassecour du côté du sud. . Si, par escalade, l'ennemi s'était emparé du
chemin de ronde H de la chemise, il lui fallait forcer, soit la porte l, soit
la porte K, pour pénétrer dans le château. Les postes établis en A ou en L le
jetaient par-dessus les parapets ou dans le fossé de la ch emise. Le poste A
servait la terrasse crénelée M au-dessus de la porte, de même que le poste L
servait le chemin de ronde N commandant le pont volant G. Quant à la garnison
du donjon, du premier étage elle pénétrait sur le chemin de ronde de la
courtine par un pont volant 0, mais en passant par le corps de garde L. Avec
des défenses aussi bien entendues, il n'y avait pas de surprises à craindre, pour peu que la garnison
du château connût parfaitement ses nombreux détours, les ressources qu'ils
présentaient, et qu'elle prît quelque soin de se garder. Une
vue cavalière restaurée, tracée du côté de la bassecour (fig. 3), fera
comprendre les dispositions intérieures et extérieures du château de Coucy.
de cette importance devait être assez triste, surtout avant les modifications
apportées au XVe siècle, modifications faites évidemment avec l'intention de
rendre l'habitation de cette résidence moins fermée et plus commode.La
cour, ombragée par cet énorme donjon, entourée de bâtiments élevés et d'un
aspect sévère, devait paraître étroite et sombre, ainsi qu'on peuten jugerpar
la vue présentée (fig.9). Tout est colossal dans cette forteresse; quoique
exécutée avec grand soin, la construction a quelque chose de rude et de
sauvage qui rapetisse l'homme de notre temps. II semble que les habitants de
cette demeure féodale devaient appartenir à une race de géants, car tout ce
qui tient à l'usage habituel est à une échelle supérieure à celle admise
aujourd'hui: les marches des escaliers (nous parlons des constructions du
XIIIe siècle), les allèges des créneaux, les bancs, sont faits pour des
hommes d'une taille au-dessus de l'ordinaire.Enguerrand
III, seigneur puissant, de mœurs farouches, guerrier intrépide,
avait-il voulu en imposer par cette apparence de force extra-humaine, ou
avait-il composé sa garnison d'hommes d'élite? C'est ce que nous ne saurions
décider; mais en construisant son château, il pensait certainement à le peupler
de géants. Ce seigneur avait toujours avec lui cinquante chevaliers, ce qui
donnait un chiffre de cinq cents hommes de guerre environ en temps ordinaire.
Il ne fallait rien moins qu'une garnison aussi nombreuse pour garder le
château et la basse cour. Les caves et magasins immenses qui existent encore
sous le rez-de-chaussée des bâtiments du château permettaient d’entasser des
vivres pour plus d’une année, en supposant une garnison de mille hommes. Au
XIII siècle, un seigneur féodal, possesseur d’une semblable forteresse et de
richesses assez considérables pour s’entourer d’un pareil
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nombre de gens d'armes, et pour leur
fournir des munitions et des vivres pendant un siège d'un an, pouvait défier
toutes les armées de son siècle: or le sire de Coucy n'était pas le seul
vassal du roi de France dont la puissance fût à redouter.Les successeurs du
redoutable Enguerrand III, véritable type du seigneur féodal, virent
l'énorme puissance de leur aïeul décliner entre leurs mains. Son fils Raoul
II périt en Égypte, à la bataille de Mansourah. Enguerrand VII, qui devint
seigneur de Coucy en 1344, fut envoyé en Angleterre comme otage de la
rançon du roi Jean, et à son retour se vit contraint d'accorder à vingt-deux
des bourgs et villages qui relevaient de son château une charte collective
d'affranchissement. Il mourut en 11396, en Bithynie. Ce fut le dernier
seigneur de la famille de Coucy. En 1400, Louis d'Orléans acquit ce beau
domaine moyennant quatre cent mille livres tournois. La terre fut érigée en
pairie pour lui, par le roi Charles VI, en 1404. Louis d'Orléans, qui fit
bâtir le château de Pierrefonds, possédait ainsi entre Paris et la Flandre
deux places d'une grande importance. Ce fut lui qui, en l'espace de deux ou
trois ans, fit reconstruire en grande partie les bâtiments d'habitation du
château de Coucy, les grandes salles des Preux et des Preuses, et quifit
surélever les anciennes courtines du temps d'Enguerrand III. D'après leur
caractère archéologique, ces constructions doivent appartenir à l'époque de
l'acquisition du domaine de Coucy par ce prince, c'est-à-dire aux premières
années du XVe siècle. Il ne paraît guère probable qu'Enguerrand VII, trouvant
son domaine dévasté et ses revenus considérablement diminués à son retour
d'Angleterre, ait pu entreprendre des travaux aussi importants et aussi
dispendieux; tandis qu'au contraire Louis d'Orléans, prince fort riche et
grand amateur des belles résidences, devait naturellement, en faisant l'
acquisition du château
de Coucy, vouloir donner à ce domaine une nouvelle splendeur.Louis
II, duc d'Orléans, en montant sur le trône en ,1498 sous le nom de
Louis XII, réunit la terre de Couey au domaine royal; elle devint l'apanage
de sa fille Claude de France, qui épousa François, duc d'Angoulême, lequel à
son tour devint roi de France sous le nom de François 1er.Coucy rentra une seconde fois
ainsi dans le domaine royal. François 1er fit faire quelques travaux dans les
bâtiments qui surmontaient la porte d'entrée du château; il n'en reste aucune
trace. Depuis, Coucy devint l'apanage des ducs d'Orléans: le frère de Louis
XIV était sire de Coucy, et son dernier seigneur fut Louis-Philippe
d'Orléans, dit Égalité.Aujourd'hui
le château de Coucy, avec le petit bois qui l'entoure, fait partie du domaine
de l'État. Depuis 1856, des travaux de consolidation et de déblayement y ont
été entrepris sous la direction de la Commission des Monuments historiques.
Ces travaux devenaient urgents, car le grand donjon, lézardé
par les explosions des mines de Metezeau, abandonné depuis lors à toutes les
intempéries, menaçait de s'écrouler en grande partie. Le gouvernement n'a pas
voulu qu'une aussi belle ruine, qui rappelle de si grands souvenirs et dont
l'aspect est encore si imposant, ne fût pas conservée. Des crédits assez
importants ont été accordés pour reprendre les lézardes principales du
donjon, pour le chaîner provisoirement au moyen de deux cercles de fer et
pour le couvrir. Les fouilles entreprises ont déjà fait retrouver des débris
intéressants: le fond dallé du fossé du donjon, la petite poterne inférieure
et les soubassements intérieurs des grandes salles des Preux et des Preuses.
Les habitants de Coucy ne peuvent plus venir arracher les pierres du château, dont les ruines sont surveillées par un gardien
demeurant dans son enceinte. La vue dont on jouit au sommet du donjons est des plus
magnifiques : on découvre la campagne depuis les plateaux boisés qui
dominent la ville de Laon jusqu’à la forêt de l’Aigue, jusqu’à Noyon et
Chauny.
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CHEMINEE DE LA SALLE DES PREUSES
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