L’abbé Jean Antoine Nollet (1700-1770) a été un pionnier en France dans la promotion et la vulgarisation de la physique, en particulier des études naissantes sur l’électricité. Tenant le prestigieux poste d’enseignant en physique et histoire naturelle pour les enfants du roi Louis XV, Nollet n’était pas seulement un expert en théorie, mais également un communicateur doué et un vulgarisateur hors pair. Grâce à son expertise et à ses compétences techniques, les cercles scientifiques et les salons sophistiqués de Paris l’ont chaleureusement accueilli. En 1735, il lance à Paris un cours public de physique expérimentale, accueillant des participants de divers âges et milieux sociaux. Ce cours, ponctué d’expériences électrostatiques époustouflantes, gagne rapidement en popularité. En 1743, il publie « Leçons de physique expérimentale », qui connaîtra sept éditions successives. L’abbé Nollet explore également le phénomène de la foudre, suggérant une connexion avec l’électricité. Malheureusement, le XIXe siècle voit son héritage s’estomper, bien que ses instruments pédagogiques continuent d’enrichir les salles de classe et d’inspirer des enseignants pour de nombreuses années. Les « Leçons de physique expérimentale » se dressent comme une référence incontournable de la physique du XVIIIe siècle. Enrichi d’illustrations détaillées, cet ouvrage monumental se déploie en six volumes imprimés. Dès sa première publication en 1745, il a suscité un vif intérêt, donnant lieu à une dizaine de rééditions en quatre décennies. Son édition originale voit le jour chez « Les Frères GUERIN » à Paris, avant d’être reprise par « DURAND, Neveu ». L’expertise de Nollet est palpable dans ses descriptions minutieuses d’une multitude d’expériences physiques, en mettant un accent sur le matériel utilisé. Alors que les volumes un et deux explorent la mécanique, la gravité et l’hydrostatique, les troisième et quatrième volumes se penchent sur les caractéristiques de l’air, de l’eau et du feu. Le cinquième volume plonge le lecteur dans le monde de la lumière et de l’optique, tandis que le dernier se consacre à l’astronomie et à l’électricité. Les travaux scientifiques de l'Abbé Jean-Antoine Nollet. Les contributions notables de cet ecclésiastique à la science incluent la conception du tout premier électroscope, instrument destiné à détecter et mesurer la charge électrique d’un objet. De plus, en 1743, il postula un lien entre la foudre et l’électricité, renforçant ainsi sa position de principal expert français sur le sujet. En effet, il postula une corrélation entre la foudre et les phénomènes dits « feux de Saint-Elme » fréquemment observés aux extrémités des mâts des navires lors de certaines conditions météorologiques. Cette idée était loin d’ être anodine puisqu’ avant lui, on s’ appuyait sur la théorie de Descartes qui supposait une origine chimique à la foudre. Lors d’un séjour aux Pays-Bas, Nollet eut l’occasion de collaborer avec Pieter Van Musschenbroek, éminent professeur de physique à l’Université de Leyde. Leurs échanges, ainsi que leur collaboration avec d’autres scientifiques, eurent un impact significatif sur le futur de la science expérimentale française. Van Musschenbroek, de son côté, cherchait à isoler ce qu’il croyait être le « feu » de l’eau par électrisation. Lors de ses expérimentations, il réalisa que les objets électrisés perdaient leur charge dans l’air. Il eut alors l’idée d’utiliser une bouteille en verre comme réservoir pour cette charge électrique car le paradigme de l’époque était que l’électricité se comportait comme un fluide. Cependant, lors d’une tentative risquée, il fut victime d’un choc électrique violent, probablement le premier du genre. Ce choc mémorable fut documenté par lui-même en 1746 et il alerta l’Académie des sciences de Paris sur les dangers potentiels de cette expérience. L’objet de cette expérimentation, désormais connu sous le nom de « bouteille de Leyde », fut en réalité le précurseur du condensateur moderne. Bien que Van Musschenbroek soit crédité pour cette invention, c’est Nollet qui la popularisa en France. Par une ironie du sort et un effet de la Providence, j’ ai découvert deux volumes authentiques des « Leçons de Physique expérimentale » de l’ Abbé Nollet dans une vieille caisse laissée à l’ abandon chez un bouquiniste de Lille qui, dans son ignorance, me les a vendus pour la somme de 5 euros ! Quelle tristesse que de voir le patrimoine scientifique de la France abandonné dans une caisse en carton… Sans la contribution de ce savant (et de bien d’ autres), l’ électricité n’ eût pu être exploitée à la fin du siècle suivant. Quand on y réfléchit bien, on mesure bien 137 ans entre ce manuscrit et la première ampoule électrique à filament de carbone… Vertigineux ! |